Chasse aux «CH » ou véhicules non immatriculés, Une Psychose s’installe à Bamako !

8 avril 2015

Chasse aux «CH » ou véhicules non immatriculés, Une Psychose s’installe à Bamako !

Crédit photo, Michel
Crédit photo, Michel

Suite à l’attaque terroriste du bar-restaurant « La Terrasse » à Bamako, qui a fait cinq morts, les autorités maliennes ont décidé de renforcer les mesures de sécurité dans la capitale et sur l’ensemble du territoire national. Ainsi, une opération « CH » fut, depuis, lancé par les forces de défense et de sécurité. Elle consiste à l’interdiction systématique des véhicules non immatriculés de la circulation.

Opération « CH », entre gâchis, arnaque et bavure

L’attaque terroriste du 28 Février dernier dans laquelle avait été  impliquée une voiture n’ayant pas de plaque et pour laquelle les recherches sont restées jusque-là sans succès, le gouvernement malien procède à l’interdiction de circuler pour les véhicules non immatriculés sur l’ensemble du territoire national. La décision a été prise lors d’une réunion interministérielle présidée par le Premier ministre Modibo Kéita.

La version officielle a affirmé que l’attentat du 28 février à Bamako, qui a fait cinq morts, dont un Français et un Belge, a été mené par un commando de deux hommes armés circulant l’un sur une moto et l’autre à bord d’un véhicule sans plaque immatriculation. La décision ministérielle concerne toutes les voitures CH et celles qui n’ont pas d’identification, selon les règles de la Compagnie de circulation routière.

C’est donc dans une ambiance de stupéfaction générale que cette mesure entre en vigueur. Tambour battant, l’opération de nettoyage semble un succès, car selon  l’autorité routière, la police a arrêté des centaines de voitures dans la cour du GMS (Groupement mobile de sécurité) et a affiché une volonté implacable à appliquer les consignes du gouvernement pour la sécurité des personnes et des biens sur l’ensemble du territoire. Mais aujourd’hui qu’en est-il du Bilan de cette opération ?

D’abord le gâchis

La Police Nationale ne disposant pas de parking adéquat pour le nombre important de véhicules interpelés et immobilisés, ces derniers se retrouvent dans un état déplorable. La canicule qui s’abat sur la ville est en train d’émietter leurs vitres et bon nombres de pneumatiques sont désormais hors d’usages. Petit à petit, la cour du GMS se transforme en un cimetière de véhicules neufs ou d’apparence neufs. Car il faut savoir la plupart de ces véhicules disposent d’une carte grise provisoire leur autorisant à circuler avec les fameux Numéro « CH » qui n’est autre que le numéro de châssis du Véhicule.

Puis la corruption

A priori, rien de nouveau à ce sujet, sauf que, la corruption accable plus la police, que n’importe quel autre service de l’Etat. Donc, rien de surprenant que de comprendre les coups d’arnaques et de pots de vin s’introduire dans cette opération réputée à ses débuts sincères. Ainsi, comme nous commençons bien à nous en apercevoir, les véhicules « CH »  interceptés, conduit et gérés par le personnel des lieux sont, pour la plupart, remis à leurs propriétaires moyennant le paiement d’un montant compris entre cinquante (50 000) et deux cent (200 000) milles franc CFA. Et au tour de tout cela s’implante et se développe une véritable mafia policière (fabriquant et vendeur parfois de plaque d’immatriculation) qui ne fait qu’atténuer tous les efforts du gouvernement pour sécuriser la ville et le territoire national. En outre, Selon des sources proches de la Compagnie de circulation routière, la quasi-totalité des véhicules sans plaque d’immatriculation appartient aux hauts dignitaires du régime. Il s’agit des  ministres, des députés et des officiers supérieurs des forces de défense et de sécurité.

Et enfin, la bavure

Dans la nuit du vendredi 03 Avril 2015, un malheureux conducteur d’un véhicule avec « CH » fut abattu par la police après qu’il ait refusé d’obtempérer. Les faits surviennent aux environs des halles de Bamako, à cheval entre le quartier de Sokoniko et Niamakoro dans la commune 6 du District de Bamako. L’infortuné répondant au nom de Moha Alassane Cissé pris de panique, après être interpelé par les éléments d’une patrouille, tente de fuir avant d’essuyer les tirs des éléments de la police et de la garde pris certainement de panique aussi. Mortellement atteint, il succombera des suites de ses blessures à l’Hôpital du Mali, l’un des trois plus grands hôpitaux du Mali. La mort de ce jeune conducteur suscite un débat houleux au sein des bamakois : une partie approuvant la réaction, et une autre la reprouvant en la qualifiant de bavure de trop. Quoiqu’il en soit, nous sommes en présence d’un état de psychose généralisé qui sort sur des situations parfois dramatiques. D’un côté, il y a les conducteurs de « CH » qui, en raison de la possession d’une carte grise provisoire et de la lenteur des procédures par les services des transports, pensent être dans une légalité de circuler. De l’autre côté, il y a les forces de  défense et de sécurité seront, de l’avis des observateurs, mal préparés face à la situation qui prévaut. Par ailleurs ils subissent une forte pression qui leur rend par conséquent nerveux d’où des situations de ce genre que d’aucuns qualifierons de bavure. En définitive et nous l’aurons bien compris la pression s’exerce autant sur les forces de sécurité que sur les usagers.

Ce que l’on peut retenir c’est que l’opération « CH » n’aura pas permis de minimiser l’insécurité, loin s’en faut. Il a plutôt permis l’installation d’un climat de psychose généralisé dans un pays qui peine à retrouver ses marques.

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