Politique malienne : un statut et un chef de file pour l’opposition

30 mars 2015

Politique malienne : un statut et un chef de file pour l’opposition

Image, Créative common
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Pourvue que cela dure !

Le constat :

On se rappelle encore que sous l’ère ATT (Amadou Toumani Touré du nom de l’ancien Président), la notion de consensus qui lui était tant chère et dont il vantait tant le mérite, avait fini par avoir raison de la si exemplaire démocratie malienne. Le Mali était devenu le bel exemple de démocratie en Afrique ; un cas d’école même.  Mais un exemple trop beau pour être vrai.  Car, à bientôt un quart de siècle de démocratie malienne, on aura parcouru  des chemins. Des chemins avec des hauts et des bas. Et puis, presque contre toute attente, arrive ce putsch du 22 Mars 2012. Un putsch qui, pour beaucoup d’observateurs de la vie politique malienne, fut un invraisemblable effondrement. Invraisemblable parce que le putsch est exécuté avec une facilité dérisoire et à un moment totalement incompréhensif.   Invraisemblable également, parce que ce putsch a occasionné l’occupation de deux tiers du territoire national.  Ainsi, l’exemplaire démocratie malienne s’est quasiment effondrée faute d’avoir pu, en un moment donné, faire le point. Comme le dirait Gaoussou Drabo, éditorialiste à l’ESSOR (quotidien gouvernemental), faire le « brainstorming » des erreurs et des fautes qui on fait cheminer le pays vers l’abime. Vous l’aurez compris que le Mali a frôlé le chaos. Un chaos évité de justesse par l’opération serval. Cependant, disons-le tout net,  ce sauvetage inespéré de la France ne nous a laissé ni le choix ni le temps. Le temps de l’autocritique et le choix de la méthode à suivre. Acculé et pressé par ses partenaires, pour n’est pas dire ces exigeants de sauveteurs, le Mali a dû faire face à l’urgence. L’urgence d’organiser et de réussir des élections présidentielles d’une part ; et d’autre part  de faire face à la situation au Nord. Finalement, faute d’avoir identifié les erreurs et les fautes  qui ont fait cheminer le pays vers l’abime, on s’est plutôt empressé de dénoncer sommairement des pratiques de gouvernance négatives et d’énumérer succinctement les changements et les solutions à apporter. En définitive, et on l’aura compris, nous avons raté le coach. Car le constat s’annonce amère au vu de la méthode adoptée par les autorités.  Mais bon malgré tout on a tenté de progresser en essayant de nouvelles formules comme celles d’une vie politique plus ou moins animée : c’est-à-dire une opposition clairement identifier avec un chef de file.

Du nouveau sous le soleil politique malien ? Pas vraiment !

On se rappelle qu’aux premières heures de la démocratie malienne, une opposition active avait réussi à s’identifier et à se faire attendre. On se rappelle de cette récurrente instabilité à la primature qui a failli emporter le Président Alpha. Puis, vient le temps d’ATT et sa politique de consensus. Cette formule, tant vanté par ces initiateurs, aura accouché d’un échec cuisant. Un échec tellement cuisant que la méthode adoptée par les acteurs politiques faisait apparaitre une espèce d’atonie de la vie politique. Car l’objectif des partis politiques étaient de fournir au chef d’Etat une majorité parlementaire confortable et loyale. De cette formule, on aura compris que les députés dits de la majorité présidentielle  ont été obnubilés par leur zèle d’accompagnement oubliant qu’en tant que représentants du peuple ils devraient avoir une faculté de veille sociale grâce à laquelle ils pouvaient infléchir sur les projets gouvernementaux.

Aujourd’hui, certes la majorité présidentielle peut se targuer d’avoir une majorité parlementaire. Mais une majorité parlementaire qui n’ignore pas s’être gonflés par un ralliement massif de nomades politiques comme ce fut le cas de la formule consensuelle sous ATT. De ce point de vue, on en conclue qu’il n y a rien de nouveau sous le soleil politique, hormis qu’on a offert un statut et un chef de file à l’opposition. En effet, Soumaila Cissé, candidat malheureux aux dernières présidentielles et non moins président de la deuxième force politique du pays, fut désigné par l’ensemble des députés se réclamant de l’opposition comme chef de file de l’opposition. On y voit, sans doute, un signe d’amélioration de la pratique politique dans notre pays.  Reste à savoir quel usage fera l’opposition de ces nouveaux modes d’actions qui s’offrent à elle. En plus d’un statut clairement identifié, l’opposition  bénéficiera des attributs de représentation pour son chef,  des canaux d’échanges ouverts entre ce dernier et les plus hautes autorités, une imprégnation des dossiers importants de la Nation le tout accompagné par un éclairage médiatique. Cette nouvelle envergure fera un regain d’image à ceux des partis (d’oppositions) qui ambitionnent de gouverner un jour ce pays. Désormais, plus question de récriminations politiques et d’ostracisme médiatique, les opposants au Mali auront à relever un réel chalenge, celui de rendre visible et crédible leur différence. Car la mauvaise réputation du politique auprès des maliens les frappe autant que la majorité.

Une Démocratie malienne pleine d’ambiguïté qui aura connu donc ces périodes héroïque pour avoir été enfanté dans la douleur ; mais aussi a surtout connu ses heures de gloire en traversant une transition atypique. Elle a aussi eu le mérite d’expérimenter plusieurs formes inédites de partage du pouvoir, comme quoi, multiplier les expériences  pour atteindre la meilleure formule de gouvernance démocratique, pourrait être une potion magique. Notre pays a connu des moments difficiles qui ont nettement décliné son aura, mais, il lui reste encore de réussir un coup d’éclat inattendu comme ce fut le cas de la belle organisation des dernières présidentielles et législatives. Il ne me reste qu’à souhaiter bond vend à l’opposition et son chef de file. Et pour cette nouvelle formule de partage du pouvoir, une belle réussite.

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