Que reste t-il de révolution de Mars 1991 au Mali ?

Article : Que reste t-il de révolution de Mars 1991 au Mali ?
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25 mars 2013

Que reste t-il de révolution de Mars 1991 au Mali ?

Amadou Toumani Touré. REUTERS/Toussaint Kluiters/United Photos/Files
Amadou Toumani Touré.
REUTERS/Toussaint Kluiters/United Photos/Files

 

22 ans après le soulèvement populaire qui a abouti à la chute du Général Moussa Traoré, le Mali aura soufflé le chaud et le froid. Je me rappelle encore de ces évènements comme si c’était aujourd’hui. Il y avait chez les maliens à cette période une forte volonté de changement. Ils voulaient coute que coute se libérer du joug de 23 ans de Dictature du Général Moussa Traoré.

Indépendant depuis le 22 septembre 1960, la jeune République du Mali, avec à sa tête Modibo Keita, choisit de rompre définitivement avec la France (ex-puissance coloniale) en optant pour un régime socialiste. Ainsi, très vite comme à l’image de nombreux régimes socialistes et apparentés, ce régime dérive dans la dictature. Ce qui tout naturellement va aboutir à un coup d’Etat intervenu le 2 Novembre 1968. A la suite de ce Coup d’Etat un groupe de jeune officier avec à leur tête le lieutenant Moussa Traore s’empare du pouvoir et instaure un Comite Militaire de Libération Nationale (CMLN). Ils promettent de remettre le pouvoir aux civils juste après une période transitoire très brève. Mais en fin de compte, ils y resteront 23 ans durant.

L’année 1991 démarre sous de mauvais auspices pour le régime fatigué et obsolète du général Moussa Traoré. Le peuple aspire à la liberté et revendique le multipartisme. Mais le président refuse d’abdiquer et oppose à la volonté populaire une répression sanglante. Face à ce état de fait, un groupe d’officier avec à leur tête le Lieutenant Colonel Amadou Toumani Touré arrête le président Moussa Traoré et instaure un régime transitoire sous la houlette du Comité de Transition pour le Salut du Peuple (CTSP). Contrairement à Moussa, ATT mène la transition à bon port en cédant le pouvoir à un civil élu démocratiquement, en l’occurrence Alpha Oumar Konaré qui est investi pour son premier mandat le 08 Juin 1992. Suivra un second mandat à l’issue duquel il cède son fauteuil à son tour au revenant ATT. Ce dernier investit pour son premier mandat le 08 Juin 2002 empilera un second mandat. A partir de cet instant, va s’écrire une nouvelle page de l’odyssée malienne. On parle désormais d’une démocratie exemplaire. Partout dans le monde,  le modèle malien séduit et inspire de nombreux pays. Les idéaux de la Révolution de Mars 1991 semble prendre l’envol. Plus que jamais les libertés individuelles sont un acquis, la démocratie est en construction malgré quelques soubresauts. Fort de ces acquits, le pays semble être dans une dynamique positive jusqu’à ce Coup d’Etat du 22 Mars 2012, le 3è de son histoire. Mais comment en est t-il arrivé là ? Qu’est ce qui peut expliquer l’effondrement d’un régime démocratique en place depuis près de 20 ans ?

Mais avant de comprendre les raisons de cette crise sans précédent que connait le pays, revenons un peu sur ce fameux coup du 22 Mars 2012. En effet, ce Coup d’Etat, en plus d’accoucher d’une crise politico-institutionnelle à Bamako, va précipiter la chute des 3 régions du Nord (Gao, Tombouctou et Kidal). Ainsi, des groupes armés constitués des rebelles du Mouvement Nationale de Libération de l’Azawad (MNLA) et leurs alliés djihadistes d’Ançar Eddine d’Iyad Ag Ghaly, d’Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI) et du Mouvement pour l’Unicité et Djihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO) s’empareront des trois quarts (¾) du territoire national. Pour la première fois de son histoire, le Mali fait face à une crise d’une gravité particulière dont l’élément déclencheur fut sans aucun doute le Coup d’Etat du 22 Mars 2012. Un an déjà après ce Coup d’Etat chaotique, on est en droit de se demander pourquoi ? Pourquoi avoir chassé par la force un président qui ne jurait que de partir ?

Mais à la veille du 22 anniversaire de la Révolution malienne de Mars 1991, il est évident que les uns et les autres soient à la recherche d’explication sur ce qui s’est réellement passé avec ATT. Cet homme, jadis adulé, héros du 26 Mars, faiseur de paix s’est montré impuissant face à ce qui se tramait depuis quelques au Nord Mali.

Avec le recul, on peut comprendre que cette crise malienne n’est pas anodine et qu’elle est suite logique de disfonctionnements te de manquements dans la gestion d’ATT. Le général Amadou Toumani Touré, après les deux mandats d’Alpha Oumar Konaré, accède à la magistrature suprême à la suite d’élection jugée crédible. A sa prise de fonction le 8 juin 2002, le candidat indépendant qu’il fut, innove et instaure un mode de gestion atypique et inédite fondé sur le consensus. C’est là un principe tout aussi atypique  qui cachait bien de réalités et considérations personnelles de courtisans qui formaient les convives autour de la table du banquet présidentiel. Autour donc, du chef, des hommes et femmes incapables d’orienter, de conseiller et même de s’opposer pour la sauvegarde de l’intérêt suprême du Mali. La gymnastique au sein de l’échiquier politique malien frisait le désespoir. Le système en place avait étalé toutes ces limites. On le voyait bien que les ambitions personnelles des uns et des autres, dans la perspective des élections présidentielles et législatives, finissaient d’aiguiser les appétits ; la règle d’or étant désormais chacun pour soi Dieu pour moi. On l’aura bien compris que dans ce règne du consensus chacun défend ses intérêts et tant pis pour le peuple naïf qui croyait qu’il s’agirait de sacrifier l’intérêt supérieur des responsables sur l’autel de celui du peuple, qui, en temps normal, est le véritable détendeur du pouvoir en démocratie. Donc, à Bamako avec ce lot de mensonges et d’hypocrisie, on sentait bien que tout pouvait arriver à tout moment y compris la chute du régime  qui, d’ailleurs, ne tenait plus que sur un seul pied.

A ses soubresauts politiques du Sud, s’ajoutait le problème sécuritaire au Nord qui n’allait certainement pas raté d’achever un régime déjà boiteux. On savait que la situation qui prévalait au Nord depuis quelques mois n’allaient pas tarder à faire parler d’elle de la manière la plus violente qu’on ne l’imagine. En effet, les échos en provenance du Nord étaient loin d’être réjouissant. L’arrivé massive de combattant en provenance de Libye  faisait peser une réelle menace pour la stabilité du pays qui déjà faisait face à des récriminations de touaregs dont il n’était plus un secret qu’ils tramaient une nouvelle rébellion  avec surtout l’appuie d’officier intégrés au sein de l’armée malienne ayant déserté avec les moyens de l’état mis à leur disposition. Tout y était réuni pour comprendre que quelque chose allait se passer. En dépit des velléités belliqueuses des revenants de la Libye, le gouvernement d’ATT avait joué à l’apaisement en leur accueillant avec armes et bagages. Ce qui faisait dirent à de nombreux observateurs que la guerre était désormais inévitable au Mali. Le président ATT avait lui-même senti le danger venir lorsque les forces coalisées avaient commencé à frapper la Libye. Il s’est d’ailleurs à plusieurs reprises plaint de la possible prolifération des armes libyennes qui pourraient contribuer à la déstabilisation de l’ensemble de la région du Sahel.

Dans tous les cas, grâce à son laxisme patent, le président ATT aura brisé les rêves et les idéaux portés par la révolution de Mars 1991. On l’aura compris, l’homme du 26 Mars 1991, le héros de toute une génération de malien, l’icône ATT aura laissé la place à un vieillard vieillissant avec en fin de compte des idées sombres pour la gestion du pays. En dépit des obstacles, le Mali continue sa route pour atteindre les objectifs de construction d’un Etat véritablement démocratique. Malgré l’incident de parcours, nous reprendrons le combat pour que le Mali libre et démocratique soit. Les sangs coulés pendant la révolution de Mars 1991 ne seront pas vains.

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Commentaires

Faty
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Mon ami , je l'espère car cela décourage de voir des jeune maliens oser fêter un certain 22...pas Septembre mais mars!!!

michouthe
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Je pense ceux qui fetent le 22 Mars ont réellement un problème avec l'histoire; et ne comprennent pas le sens de la revolution de Mars 1991